Alain Ecuvillon, directeur général d’Itslearning France, a donné au cours d’une entrevue avec le site ToutEduc, son point de vue au sujet du récent rapport de la Cour des comptes qui remet en cause l’intérêt des Espaces Numériques de Travail (ENT). Retour sur l’analyse d’un paysage que ce dernier qualifie de « mouvant ».
ToutEduc : itslearning est une multinationale. D’où vient-elle ?
Alain Ecuvillon : Imaginée en 1999 par des étudiants norvégiens, l’entreprise compte aujourd’hui près de 350 salariés, elle distribue ses solutions dans une quarantaine de pays pour un chiffre d’affaires d’environ 40 M€, dont un peu plus de 2 M€ en France (après un « trou d’air » en 2014).
ToutEduc : Le marché évolue donc très rapidement…
Alain Ecuvillon : Selon la Cour des comptes, les trois principaux acteurs sont : itslearning, KOSMOS et ITOP, bien que cette dernière ait perdu plus de 80% des marchés de l’éducation supérieure qu’elle détenait. Une situation que nous avons connue en 2014 lorsque nous avions perdu les marchés des régions et des départements d’Alsace (ENTEA) et d’Auvergne (ENT Auvergne).
Depuis 2014, nous avons gagné de nouveaux marchés dans le secondaire comme dans le supérieur ou en Belgique, par souci de diversification.
ToutEduc : La concurrence est-elle exacerbée ?
Alain Ecuvillon : Oui, et elle a fait bien trop baisser les prix. Le rapport de la Cour des comptes indique une valeur comprise entre 4 € et 7,2€ par élève et par an, cepedant nous en sommes aujourd’hui bien en-dessous, jusqu’à parfois moins de 1€ pour le 1er degré par exemple.
ToutEduc : Les ENT rendent-ils des services à la mesure de leur coût ?
Alain Ecuvillon : Pas tous hélas. Néanmoins, l’ENT d’itslearning est avant tout une plateforme d’apprentissage pédagogique et pour nous, l’ENT n’a d’intérêt que si il a une vraie valeur ajoutée pédagogique. Et là, ça marche !
Nous avons eu la chance de pouvoir faire une évaluation grandeur nature avec un lycée de Trappes. En 2012, le taux de réussite au bac était de 64 %, l’année suivante il a atteint 88 %. Le lycée était premier au classement IVAL de plus-value des établissements.
ToutEduc : Vous parlez de classe inversée, quel rapport avec un ENT ?
Alain Ecuvillon : Un ENT est trop souvent cantonné à des fonctions liées à la vie scolaire (absences, notes, correspondance avec les familles) alors que pour nous, c’est un outil qui permet aux enseignants de mettre en ligne sur Internet leurs cours et leurs exercices. C’est à la fois un véritable tableau de bord pour l’établissement et une outil collaboratif pour les enseignants et pour les élèves/étudiants.
ToutEduc : Et c’est bien ainsi qu’il est utilisé ?
Alain Ecuvillon : Absolument, si 70% des enseignants et 80% des élèves l’utilisent. Dès lors qu’on a compris l’intérêt de cet outil, on l’utilise. Cependant, cela nécessite un accompagnement. Or, l’Education nationale et les collectivités ont beaucoup investi dans les matériels, et bien peu dans la formation des personnels.
ToutEduc : Vous prévoyez de nouveaux développements ?
Alain Ecuvillon : Oui. Aux Etats-Unis, en Virginie plus précisemment, les établissements qui ne peuvent ouvrir « physiquement », faute de conditions météorologiques adéquates, deviennent virtuels et tous travaillent avec l’ENT via un smartphone par exemple. Bien-sûr, ça ne remplace pas des cours en présentiel, mais l’ENT assure la continuité du service d’enseignement. En France, certains d’établissements sont inquiets vis à vis de la réforme du lycée, notre solution permet d’organiser et de mutualiser avec d’autres établissements ces enseignements.
ToutEduc : Finalement, qu’est-ce qu’un ENT ?
Alain Ecuvillon : C’est un cadre de confiance, qui permet de travailler et de collaborer avec les autres en toute sécurité, afin d’améliorer ses connaissances et ses compétences.
Interview initialement parue le 10 juillet sur Touteduc.fr